Gaëtan Decroix, un cavalier au grand coeur!
En 2019, Gaëtan Decroix, cavalier et éleveur belge établi en Normandie, a créé l'association caritative Horse & Hope pour soutenir la lutte contre le cancer.
L'an dernier, il avait collecté 34.000€ dans le cadre d'une vente aux enchères organisée sur le site www.ekestrian.com, opération caritative qu'il a réitérée les 16 et 17 février derniers par la mise en vente de plus de 1.000 paillettes et saillies offertes par de généreux étalonniers.
Extrait de l'interview donnée pour la plate-forme Ekestrian afin de promouvoir son action :
Comment vous est venu l’idée d’un appel aux dons sous la forme d’une vente aux enchères caritative en ligne ?
J’ai eu deux cancers, l’un en 2015, l’autre en 2019. On m’a alors proposé de rentrer dans un programme expérimental, avec un traitement très lourd qui obligeait d’être en isolement en chambre stérile pendant plusieurs semaines, sans garantie de résultats supérieurs à ceux des traitements connus. Mon cœur avait envie d’aider la science, mais j’avais d’autres projets. Je n’ai pas eu le courage, j’ai refusé.
"J’ai eu envie de dire merci à la vie, de remercier, à ma manière, ceux qui soignent et ceux qui travaillent sans relâche pour trouver de nouveaux traitements"
2019 était une année avec un contexte émotionnel très fort, riche du point de vue de l’amitié et du sport. J’ai eu envie de dire merci à la vie, de remercier, à ma manière, ceux qui soignent et ceux qui travaillent sans relâche pour trouver de nouveaux traitements. Je me suis alors dit qu’offrir, de la part de mes confrères, une saillie de leur(s) étalon(s) dans une vente aux enchères dont les profits seraient reversés à la recherche contre le cancer ne devait pas être insurmontable. Et j’ai eu raison.
Comment avez-vous convaincu les donateurs ?
Le cancer est une maladie qui concerne tout le monde. Il n’y a pas une personne qui ne soit touchée, dans son propre corps ou dans celui de ses proches. Le cancer m’est tombé dessus sans prévenir. Le regard des autres a changé sur moi. Je ne me suis jamais caché. Il y a beaucoup d’argent dans notre milieu, qui peut paraître, parfois, un peu superficiel mais où il y a aussi, et surtout, beaucoup d’humanité.
En 2019, j’ai commencé par contacter des amis. Tout est allé vite, j’avais à peine le temps de finir ma phrase, d’argumenter sur la mise en avant des étalons via la promotion autour de la vente en ligne qu’on me posait la question : « Que donner ? ». Rien. Une dose qui passe parmi tant d’autres. Les enchérisseurs, de leur côté, n’ont pas hésité à mettre un peu plus d’argent dans la vente, ils voulaient contribuer.
Mon message était passé : le cancer peut se soigner, il ne doit plus être synonyme de mort. Il faut en parler, il faut lutter, il faut aider la recherche, les malades et leur entourage.
Quels sont les objectifs d’Horse & Hope ?
En 2020, Horse & Hope a récolté 33 673€ qui ont été reversés à deux associations, Se Vince et les Amis de Bordet. La clinique de Bordet, qui est un site majeur dans la recherche contre le cancer en Belgique, est aussi le lieu où j’ai été soigné. La somme versée aux Amis de Bordet a servi pour apporter de l’aide psychologique aux jeunes cancéreux.
"La clinique de Bordet, qui est un site majeur dans la recherche contre le cancer en Belgique, est aussi le lieu où j’ai été soigné."
Pour la vente 2021, je suis directement contacté par de nouveaux donateurs qui veulent offrir une saillie de leur(s) étalon(s). Parfois, je ne les connais pas. Ils veulent aider, encourager. Cette année, la vente Horse and Hope proposera un embryon. C’est une première qui montre l’engagement des donateurs car concevoir un embryon coûte de l’argent.
Que pensez-vous des avancées de la recherche contre le cancer ?
La recherche contre le cancer avance tous les jours. Beaucoup de cancers se soignent aujourd’hui. Les traitements sont meilleurs qu’hier et seront plus efficaces demain. Ils sont aussi mieux tolérés. Je reçois beaucoup de témoignages, avec la parole qui se libère autour du cancer, et beaucoup me disent qu’avec les traitements qu’ils ont eu il y a quinze ans, ils n’auraient jamais pu continuer à mener leur vie comme j’ai mené la mienne.
"Les traitements sont meilleurs qu’hier et seront plus efficaces demain".
Mais la recherche, et l’accompagnement des malades et de leur entourage, coûtent cher. Horse & Hope, c’est une goutte d’eau dans l’océan mais grâce à toutes les petites gouttes, on va y arriver tous ensemble. Si Horse & Hope, par l’argent apporté, parvient à sauver ne serait-ce qu’une seule personne dans les 30 prochaines années, j’aurai gagné.
Quel message souhaitez-vous faire passer aux personnes qui sont atteintes d’un cancer et à leur entourage ?
Outre que les traitements sont de plus en plus efficaces et que la science avance très vite, je voudrais leur dire qu’il faut parler, ne pas rester seul. La parole est puissante et en elle réside une partie de la guérison. Le corps se soigne aussi avec la tête et le partage avec les autres est essentiel. C’est ce qui a beaucoup marqué les autres quand j’ai été clair sur ma situation.
"Je voudrais leur dire qu’il faut parler, ne pas rester seul. La parole est puissante et en elle réside une partie de la guérison".
Mon premier cancer, en 2015, était un cancer du testicule. Quoi de plus personnel ? Or ce cancer est le plus courant chez les hommes jeunes. Je me suis dit que si je libérais ma parole, d’autres le feront et pourront être dépistés, soignés, aidés plus vite. Alors que le cancer du sein est (presque) abordé sans tabou, ce n’est pas le cas d’un cancer du testicule, parce qu’il touche à l’image de la virilité…
Mon second cancer s’est manifesté sous la forme de cellules résistantes dans les ganglions abdominaux. J’ai dû subir une chimiothérapie assez agressive. Mais je me suis relevé. Les médecins sont souvent pessimistes, car ils préfèrent préparer au pire que de donner de faux espoirs, mais il faut se battre, s’accrocher. Rien n’est jamais perdu.
Je veux ajouter qu’actuellement, le monde tourne autour de la Covid 19, ce qui met de côté les autres pathologies soit parce que les gens ont peur d’aller à l’hôpital, soit parce que les médecins ne peuvent pas les recevoir. Il faut insister pour poursuivre les traitements en cours. C’est vital.
Un mot sur vos chevaux? Qu’aimez-vous-en eux ?
Ah, c’est une curieuse question pour moi qui suis professionnel ! C’est difficile d’y répondre spontanément… Ce que j’aime, c’est leur regard. La complicité qui s’installe. J’ai des chevaux vraiment gentils et c’est un plaisir de s’en occuper. Mais il y a quelqu’un qui compte plus que tout, c’est Quel Homme de Hus (ndlr: sur la photo avec Gaetan Decroix à gauche).C’est un cheval intelligent. On a l’impression qu’il comprend tout car il sait tirer parti de chaque moment. On nous a proposé de très grosses sommes pour Quel Homme. Mais c’est notre ami, et on ne vend pas son ami.